Entretien avec Mr Francis Jean Jacques EVOUNA, Président du Conseil Gabonais du Patronat (CGP) en cette nouvelle année qui est d’ailleurs charnière pour notre pays pour cause des élections générales (Présidentielles, législatives, locales et Sénatoriales) …
Président ! Après vos vœux, vous parlez d’une loi Pacte PME, quels sont les changements que pensez-vous y apportés par ce Pacte pour libérer les PME des contraintes qui pèsent sur leur croissance à toutes les étapes de leur développement ?
Francis Jean Jacques EVOUNA : Merci de me permettre en si peu de temps de m’exprimer dans vos colonnes. Le Patronat dans son ensemble doit amener le Gouvernement à élaborer le Pacte PME relatif à la croissance et la transformation des entreprises dite loi Pacte (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises) qui devrait avoir pour objectif de donner aux entreprises, notamment PME et ETI, les moyens d’innover, de grandir et de créer des emplois, d’harmoniser et cet objectif passe notamment par la simplification des démarches relatives à la création et au fonctionnement de l’entreprise et ainsi par la diminution des coûts induits par les contraintes administratives et réglementaires. La loi Pacte PME devrait prévoit une série de mesures qui participent à cet objectif et notamment : Le relèvement au niveau des seuils de certification légale des comptes et leur harmonisation. Désormais, seules les entreprises remplissant 2 des 3 conditions suivantes seront obligées de désigner un commissaire aux comptes : un bilan supérieur ou égal à 200 millions de FCFA, un chiffre d’affaires HT supérieur ou égal à 1 Milliard de FCFA, un effectif supérieur ou égal à 50 personnes. Ces nouveaux seuils sont applicables à l’ensemble des sociétés commerciales. La désignation d’un commissaire aux comptes pour les Sociétés Anonymes et les Sociétés en Commandite par Actions n’est donc plus obligatoire. Les seuils d’effectifs sociaux doivent être également allégés et simplifiés. Sauf exceptions (ex : seuil de 20 salariés pour l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés), les seuils sont regroupés à partir du 1 février 2023 en trois niveaux : 11, 50 et 250 salariés. Ce regroupement s’accompagne d’un dispositif visant à lisser les conséquences d’un franchissement de seuils (nécessité d’un dépassement des seuils pendant cinq années consécutives). Ainsi, la suppression (sauf exceptions) du seuil de 20 salariés devrait entraîner corrélativement une diminution de certaines charges sociales pour les entreprises de moins de 50 salariés. Par exemple, la contribution à hauteur de 0,10 % du fonds national d’aide au logement (FNAL) qui faudra créer et qui serait due par les employeurs s’appliquera à partir de 2023 jusqu’à 50 salariés (au lieu de 20 salariés actuellement). S’agissant de la participation des employeurs à l’effort de construction, celui-ci ne concernera à partir de 2023 que les entreprises disposant d’au moins 50 salariés (contre 20 salariés actuellement). La loi Pacte comportera d’autres apports destinés à simplifier la création et la vie des entreprises, comme par exemple la dématérialisation des démarches administratives par la mise en ligne, d’ici 2024, d’un site internet destiné à centraliser les formalités exécutées jusque-là par l’ANPI.
Monsieur le Président ! Quels sont les axes principaux de la loi PACTE qui permettent de mieux accompagner les entreprises à l’export ?
Francis Jean Jacques EVOUNA : loi Pacte devrait prévoir notamment le renforcement du rôle d’une société d’assurance à créer, l’assurance prospection, destinée aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel est inférieur à 500 millions de FCFA, proposée par cette société d’assurance à mettre en place ce qui deviendrait plus attractive. En contrepartie d’un engagement de sa part de rembourser 30 % du montant perçu, l’entreprise pourrait recevoir désormais dès le début du contrat une avance de trésorerie à hauteur de 50 % de son budget prévisionnel. Outre la création d’un mécanisme d’assurance-crédit étatique, la loi Pacte devrait prévoir également la création dans chaque région d’un guichet unique regroupant les Chambres de Commerce et de l’Industrie. Ce guichet unique est destiné à être le seul interlocuteur de l’exportateur.
Monsieur le Président ! La trésorerie des PME est un élément indispensable de la croissance : quelles seraient les avancées de la loi PACTE à ce sujet ?
Francis Jean Jacques EVOUNA : Nous pouvons citer particulièrement deux mesures. D’une part, l’assouplissement des conditions d’octroi des avances en compte courant d’associé, avec la suppression du seuil minimal de détention capitalistique de 5 % d’une part, le rehaussement des avances que pourraient versées par l’État aux PME titulaires de marchés public de l’État (rehaussement de 5 % à 20 %), d’autre part, Dans un premier temps, ce nouveau taux s’appliquera aux seuls marchés dont la durée d’exécution est supérieure à deux mois et dont le montant initial est supérieur à 30.000.000 de FCFA HT. ANPI qui est le Centre de formalités des entreprises doit être partie prenante à cette loi Pacte à élaborer.
Monsieur le Président ! Le Nouveau Président de la CPG devenue FEG a plusieurs fois été reçu par les plus hautes autorités, vous n’étiez pas de la partie. Est-ce à dire que vous ne partagez pas les mêmes préoccupations ou bien vous n’y êtes pas membre ?
Francis Jean Jacques EVOUNA : Je pense qu’il est tout à fait normal qu’un nouveau président de patronat et pas le moindre car il s’agit du grand patronat puisse aller présenter son bureau aux plus hautes autorités du pays et probablement sa feuille de route, pourquoi voudriez-vous que cela puisse m’offusquer. Il s’agit de la CPG qui s’est muée en FEG et dont j’avais salué le retour du Président Henri Claude OYIMA. La FEG n’a pas vocation à faire disparaitre les autres structures patronales autant que je sache, j’ai plutôt foi que nous sommes complémentaires dans le rôle que chacun de nous jouons dans l’économie de notre pays. Je pense que lorsque les plus hautes autorités auront besoins d’entendre un notre son de cloche du secteur privé qui est compartimenté en plusieurs segments, elles le feraient. Nous demanderons tout aussi des audiences à ces mêmes hautes autorités pour parler aux noms des segments qui sont les nôtres. Ceci étant, lorsque nous auront ce privilège de rencontrer SE Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat et SE Mr Le Premier Ministre Chef du Gouvernement et les membres de son gouvernement chacun dans son département nous leurs apporterons le message des PME/PMI. Nous échangerons sur de nombreux sujets qui préoccupent les employeurs du segment dans lequel nous évoluons qui crée des richesses et des milliers d’emplois ce que les grandes entreprises ne font plus en réalité. Les défis de la transition énergétique et de l’économie verte et les enjeux législatifs seront quelques-uns des sujets que nous aborderons avec elles. La pénurie de main-d’œuvre serait également au menu de ces rencontres car pour les employeurs, la pénurie de main-d’œuvre est l’enjeu numéro un. C’est pourquoi le CGP voudrait discuter avec elles en cette année 2023 qui constitue une année charnière, il faut pouvoir avoir de la possibilité de mobiliser la société civile pour trouver ensemble des solutions globales. Rappelons qu’il y a dans notre pays un taux de chômage qui avoisine 31%. Il faut aussi se pencher sur les façons d’améliorer la productivité de nos entreprises. Réduire l’écart de richesse doit être l’une de nos priorités. L’économie verte et la transition énergétique sont tout aussi des défis de taille. Il a également été question des défis d’accélérer le virage vers une économie plus verte. Le CGP partage les ambitions de SE Monsieur le Président de la République Chef de l’Etat un leader dans la transition écologique. Par contre, il faut accompagner les employeurs dans ces transformations, c’est pourquoi le CGP recommande d’utiliser davantage l’écofiscalité, l’économie circulaire et d’anticiper les besoins à venir en termes de formations et compétences de la main-d’œuvre. Le CGP abordera au cours de ces audiences éventuelles aussi les besoins futurs en énergie, un élément essentiel pour assurer la de carbonisation du milieu économique. Afin d’assurer que nos entreprises aient accès à l’énergie nécessaire, on doit maintenir l’équilibre entre projets d’exportation et les besoins au niveau local, développer davantage la part des énergies renouvelables et encourager l’efficacité énergétique. Il importe de revisiter trois réformes simultanées des enjeux d’application pour les entreprises. Depuis le gouvernement de SE Mme Rose Christiane OSSOUKA RAPONDA, plusieurs réformes d’envergure auraient dû concerner les employeurs. La réforme de la santé et sécurité au travail par exemple je suppose que le nouveau Premier Ministre en tiendrait compte. Les dispositions visant le renforcement de la législation économique et les changements à mener pour un plan d’accélération de la Transformation plus efficace doivent rapidement entrer en vigueur de façon progressive, mais avec des exigences importantes pour se conformer. Ces trois dossiers inquiètent les employeurs gabonais. L’une ou l’autre de ces trois réformes reviennent presque systématiquement dans les points d’inquiétude soulevés par nos membres. Les entreprises ont besoin d’être accompagnées et sont soucieuses de se conformer aux nouvelles règles, mais elles ont besoin de temps. Je dirais aux hautes autorités gabonaises qu’on doit partager les mêmes objectifs, mais il vaut mieux prendre en compte la réalité du milieu des affaires dans notre pays pour y arriver.
Monsieur le Président ! Votre mot de fin
Francis Jean Jacques EVOUNA : Le patronat doit redevenir les explorateurs des temps modernes. L’univers des possibles pour nous les gabonais est immense. Tout est à inventer. Tout reste à investir. Nous sommes comme des explorateurs des temps modernes, à la recherche des nouveaux territoires, non plus seulement géographiques, mais aussi temporels, puisque c’est le futur qu’il nous faut découvrir, ou plutôt bâtir.
Je vous remercie.